La petite patrie de Stofflet conserve d’intéressants souvenirs historiques disséminés dans la ville. Ces lieux souvent discrets sont indiqués par des panneaux explicatifs tout au long d’un parcours de visite que j’ai suivi ce dimanche.
Au cœur de Maulévrier, la fontaine de Stofflet (n°1)
Itinéraire de la promenade (les numéros renvoient au texte et aux photos)
Fichier PDF : Balade à Maulévrier.pdf
J’ai fixé mon point de départ devant l’élégant château de la famille Colbert de Maulévrier, incendié pendant les Guerres de Vendée et reconstruit sous la Restauration. On trouve dans le parc, près de la grille d’entrée, un obélisque surmonté d’une fleur de lys (n°2), élevé en 1826 à la mémoire de Jean Nicolas Stofflet, général vendéen. Plus loin, aux abords du château, une plaque posée par le Souvenir Vendéenévoque l’histoire du chevalier Colbert de Maulévrier (1758-1820), aide de camp de Stofflet en 1793. Il fut aussi l’un des chefs de l’insurrection royaliste du 13 vendémiaire an IV à Paris, que Bonaparte écrasa à coups de canons.
Détail de la fontaine de Stofflet (n°1)
13 mars 1793, l'entrée en guerre de Stofflet et la marche sur Cholet
27 mars 1794, Stofflet écrase les Bleus à la bataille des Oulleries
La mémoire de Stofflet est également honorée par une fontaine placée devant l’entrée du château (n°1). Ce monument réalisé par P.-A. Charbonneau et inauguré le 12 juin 1994 se compose d’une sphère portant la date de 1793, et d’une série de six plaques de bronze illustrant les principaux épisodes de la vie du général vendéen : son portrait, son entrée en guerre (13 mars 1793), le passage de la colonne infernale de Caffin à Maulévrier (22 janvier 1794), le massacre de la forêt de Vezins suivi de la bataille des Oulleries (25-27 mars 1794), et la mort de Stofflet à Angers (25 février 1796).
Sur la place du marché (n°3) se trouvait le logis du Palais, siège de la sénéchaussée,
dont on aperçoit un reste de la tour portant un pan coupé
Remontant la rue Joseph Foyer, je fais étape sur ce qui fut, au XVe siècle, la place du marché (n°3). Il reste peu de vestiges visibles des anciens bâtiments, si ce n’est la base d’une ancienne tour octogonale masquée par des constructions plus récentes. Des halles en charpentes de chêne y furent édifiées au XVIIIe siècle pour abriter les foires de Maulévrier. Les insurgés de mars 1793 ont probablement dû s’y rassembler.
Poursuivant ma route, j’aperçois sur ma gauche le logis de la Croix (n°4), belle demeure du XVIIe siècle, incendiée elle aussi en 1794, puis acquise au début du XIXe siècle par Louis Étienne Baguenier Desormeaux, chirurgien-major de l’armée de Stofflet. À l’angle de la propriété, une rue étroite se prolonge en un chemin de terre connu sous le nom de « Chemin des Soupirs » (n°5).
Le Chemins des Soupirs... (n°5)
... vers le viaduc de Maulévrier
Bordé par le mur d’enceinte du Château-Colbert, ce routin conduit au manoir de l’Houmois. Son nom de « Chemins des Soupirs » trouverait son origine dans la liaison de deux amants, Jacques de Montbron, seigneur de Maulévrier et propriétaire de l’Houmois à la fin du XIVe siècle, et Yolande Escoubleau du Sourdis, qui abritèrent dans cet endroit reculé leurs trois enfants adultérins.
Plus loin en avant du viaduc, à droite du chemin, s’élève une croix de ciment fichée dans un énorme rocher moussu : la Croix des Adieux. Elle marque le lieu de la dernière rencontre de Charles Antoine Colbert de Maulévrier avec son fils Paul, tuéà l’âge de 15 ans dans un accident de chasse près de la métairie de la Roche, le 1er septembre 1847.
Le Château-Colbert vu depuis le viaduc de Maulévrier
Après une rapide exploration du viaduc, dont la voie de chemin de fer est aujourd’hui désaffectée, je rebrousse chemin jusqu’au logis de la Croix (n°4). Je continue tout droit dans la rue des Petits Ponts, tourne à droite dans la rue du Palais, avant de m’arrêter dans la rue Cossin de Belletouche, devant ce qu’il reste du manoir de l’Ougerie (n°6). Cette grande bâtisse du XVIIIe siècle, brûlée par les soldats républicains en 1794, n’a conservé que ses porches d’entrée. Elle est actuellement occupée par une maison de retraite.
Les porches de l'Ougerie, rescapés de l'incendie de 1794 (n°6)
La chapelle de la maison de retraite
Plus loin, en arrivant dans la rue du Cardinal Luçon, je découvre un logis de la même époque (n°7), construit par Pierre Bodi, notaire et avocat. Les soldats de la colonne infernale de Caffin ne l’épargnèrent pas plus que les autres maisons de Maulévrier. Le logis fut restauré par René François Bodi, fils de Pierre, et chef du comité royaliste au temps des Guerres de Vendée. Par la suite il fut acquis par Louise de La Rochejaquelein, sœur d’Henri.
Je repars vers la gauche jusqu’à la place de l’Aire du Four (n°8), ainsi nommée à cause de la présence de fours banaux avant la Révolution. J’emprunte alors la rue des Juifs qui abrite deux maisons fort discrètes. La première (n°9), côté gauche, fut habitée par Pierre Bibardà la fin de sa vie, de 1839 à 1841. Ce capitaine de paroisse, célèbre pour le pardon qu’il accorda à son geôlier, sera célébré prochainement à La Tessoualle.
La maisonnette de Pierre Bibard, à droite, avec une fenêtre à l'étage (n°9)
Plus bas, sur la droite (n°10), une façade presque aveugle cache la maison natale de Louis Luçon (1842-1930). Cet enfant des Mauges, fils de tisserand, fut ordonné prêtre en 1865. D’abord vicaire de Saint-Lambert-du-Lattay, il fut nommé curé de La Jubaudière en 1875, archiprêtre de Notre-Dame de Cholet en 1883, puis évêque de Belley en 1887. Devenu archevêque de Reims en 1906, en pleine rupture du Concordat, et cardinal l’année suivante, il fut durement éprouvé par la Grande Guerre qui ravagea son diocèse et sa cathédrale. Il conserva tout au long de sa vie une grande popularité parmi ses ouailles (lien vers le site de l'association Cardinal Luçon).
La maison natale du Cardinal Luçon (n°10)
La rue des Juifs s’achève face au mur du cimetière (n°11). À l’entrée, une plaque commémorative posée par le Souvenir Vendéen en 2007 rappelle qu’ici repose le chirurgien-major de l’armée de Stofflet, Louis Étienne Baguenier Desormeaux (1761-1836). Un vitrail de l’église du Pin-en-Mauges le représente, soignant les malades et les blessés dans l’hôpital de la forêt de Vezins.
L'entrée du cimetière et la plaque du Souvenir Vendéen
La tombe de Baguenier Desormeaux, célèbre chirurgien vendéen (n°11)
(indiquée par la flèche blanche)
Après un moment de recueillement, je reviens vers l’église de Maulévrier, par la rue Jeanne d’Arc. Je longe sur ma droite le mur d’enceinte de la Brunière, beau manoir du XVIIe siècle, formé d’un corps de logis central encadré de deux ailes (n°12). Les Colonnes infernales y laissèrent un triste souvenir : outre l’incendie général qui l'affecta sévèrement, sept personnes furent fusillées en ce lieu.
Le logis de la Brunière (n°12)
À noter les belles corniches ouvragées mêlant la brique et le granit
Je parviens enfin devant l’église (n°13). On ne voit que peu de traces de celle qu’a connue Stofflet, sinon le clocher datant du XIIIe siècle. La tour servait de guet pendant les Guerres de Vendée. On y sonnait l’alarme, car Stofflet y avait installé une cloche prise au village de Rablay, mais malheureusement déposée en 1881. Le reste de l’église a été rebâti à la fin du XIXe siècle. De grandes baies ouvertes dans les murs inondent littéralement la nef de lumière. On remarque près du chœur un beau portrait du Cardinal Luçon, l’enfant du pays.
Le vieux clocher (on remarquera le mascaron en haut du contrefort)
La façade de l'église de Maulévrier (n°13)
La nef ornée de part et d'autre de statues de saints
En descendant la rue du Commerce, se déploie sur ma gauche la façade parfaitement symétrique du logis de la Croix-Verte (n°14). Cette ancienne auberge construite en 1767 fut exceptée de l’incendie par les Bleus qui l’occupèrent. Ce type de bâtiment, comme les relais de poste, s’avérait pratique pour loger un détachement de soldats avec leurs chevaux. Stofflet en fit d’ailleurs, et pour la même raison, son quartier général.
Le logis de la Croix-Verte, quartier général de Stofflet (n°14)
Je rejoins au bas de la rue mon point de départ, bouclant ainsi ma petite promenade à travers les rues de Maulévrier.