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Le « Saint Bleu » d’Ingrandes-sur-Loire

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Dans un coin du cimetière d’Ingrandes-sur-Loire, une tombe très simple bordée d’ardoises se distingue par les objets qui la couvrent, principalement des souliers d’enfants. Objet d’une dévotion populaire depuis la Révolution, elle abrite la dépouille d’un soldat républicain connu depuis lors comme le « Saint Bleu ».

Le Saint Bleu 1À l'angle sud-ouest du cimetière d'Ingrandes-sur-Loire,
repose le « Saint Bleu ».
  

Commune patriote placée aux premières lignes face aux Mauges de 1793 à 1796, Ingrandes-sur-Loire a vu passer sur son sol de nombreuses troupes républicaines et a fourni elle-même des gardes nationaux et des volontaires pour combattre l’insurrection vendéenne. Parmi ces soldats bleus, on raconte qu’il y en eut un qui aurait été tuéà coups de pelle par des paysans dans le bas de la côte de la Bouvraie (1). On ignore tant la date de sa mort que l’identité même de la victime.

Le corps fut inhumé dans le cimetière et serait tombé dans l’oubli si le défunt ne s’était pas obstinéà sortir son index de sa tombe et à le pointer vers le ciel. « Bien que les Ingrandais de l’époque aient tout fait pour remettre les choses en ordre, le même scénario se reproduisit jusqu’à ce que l’opinion publique s’émeuve et le canonise, ce qui permit à notre soldat de dormir enfin tranquille. Les personnes venues prier sur sa tombe s’aperçurent alors que le Saint Bleu avait le pouvoir de guérir les maladies de peau (boutons, eczéma) ainsi que de faire marcher les jeunes enfants » (2). Il fallait pour cela lui adresser une prière et rouler le bambin dans le sable de l’allée devant la tombe pour obtenir la grâce du « Saint Bleu », qu’on remerciait en plaçant un ex-voto près de sa croix.

Cette sépulture n’a longtemps été qu’un talus de sable surmonté d’une croix de fonte et couvert d’objets religieux, mais aussi de chaussures de bébés, d’un mouchoir, de fleurs ou d’un dessin d’enfant, etc., au point que certains y déposaient du mobilier funéraire hors d’usage, comme si l’endroit fut la décharge du cimetière (3). La municipalité d’Ingrandes-sur-Loire fit nettoyer cette tombe, aujourd’hui délimitée par une bordure rudimentaire d’ardoises fines.
  

Le Saint Bleu 2La tombe du « Saint Bleu ».
 

Il existe d’autres exemples de dévotion de ce type dans l’Ouest, comme la « tombe à la Fille », au cœur de la forêt de Teillay (Ille-et-Vilaine), où repose Marie Martin qui fut massacrée par des Chouans vers la fin de l’année 1795. Le culte de celle qu’on appela « Sainte Pataude », alimenté par de nombreux bienfaits et guérisons, attira aussitôt de nombreux pèlerins, y compris du côté royaliste.

Un autre « Saint Bleu »était vénéré au XIXe siècle à Sainte-Anne-d’Auray. Il s’agissait d’un soldat issu d’une colonne d’impériaux qui fit étape dans cette commune lors du soulèvement des Cent Jours. Épuisé et malade, ce dernier fut oublié par ses compagnons d’armes et, se retrouvant seul en milieu hostile, fut supplicié par trois réfractaires qui l’avaient débusqué. Sa tombe située à l’entrée du village de Sainte-Anne, en venant de Pluneret, devint l’objet d’un véritable pèlerinage, mais elle disparut au début du XXe siècle (4).
  


Notes :

  1. Lieu-dit au nord-ouest de la commune.
  2. D’après la notice déposée sur la tombe
  3. Michel Lagrée, Jehanne Laroche, Tombes de mémoire. La dévotion populaire aux victimes de la Révolution dans l’Ouest, 1993, p. 55.
  4. Ibidem, pp. 43-45.
      

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