Une quinzaine de Brigands de la Vendée ont été aperçus hier après-midi, arpentant la vieille route de Bressuire à Mauléon, entre le Bois des Chèvres et le Pont-Paillat… Ce premier rendez-vous de l’année a été l’occasion d’heureuses retrouvailles, d’une marche mémorable et d’instants de recueillement.
Photo souvenir sur le Pont-Paillat
On attendait la neige pour donner à notre escapade un cachet hivernal. Quelques flocons nous ont donné cette illusion au matin, mais le soleil en a fait justice. Tant mieux, car certains participants venaient de loin – de Bourgueil en Touraine ou de Baugé en Anjou – et le beau temps a permis à tous de venir profiter de cette promenade historique.
Richard Lueil, qui l’organisait, nous a donné rendez-vous à la Croix de Bel-Air à 13 heures. Situé sur une hauteur entre Nueil-les-Aubiers et Le Pin, ce monument fut érigé en 1964 par le Souvenir Vendéen, pour commémorer les deux batailles du Bois du Moulin aux Chèvres (deux défaites, hélas !) en juillet et octobre 1793. Et c’est précisément sur le principal lieu de mémoire de ces combats que nous nous sommes rendus pour commencer.
À l'entrée du mémorial, la plaque du Souvenir Vendéen (1989)
Devant la grande croix du mémorial
Évocation historique des batailles du Bois des Chèvres par Richard (2e à gauche)
La forêt qui s’étend à l’est de la Croix de Bel-Air borde l’ancienne route de Bressuire à Mauléon. Bien moins étendue aujourd’hui qu’à l’époque de la Révolution, elle était toute désignée pour abriter un mémorial commémorant les combats qui se déroulèrent à sa lisière. On y découvre un chemin de croix jalonné de grosses pierres sur lesquelles ont été gravés les noms des chefs et des combattants vendéens qui s’affrontèrent aux Bleus sur ce champ de bataille : La Rochejaquelein, Lescure, Marigny et Stofflet bien sûr. Mais aussi des noms moins connus : Louis Renou qu’on vit sommer le château de Saumur de se rendre le 9 juin 1793, venir en aide à Lescure mortellement blessé près de la Tremblaye le 15 octobre 1793, refuser la paix en 1795 et rejoindre Cadoudal ; Henri Allard, l'aide de camp d'Henri de La Rochejaquelein ; Pierre Charrier, capitaine des chasseurs de Nueil-sur-Argent, qui fit lui aussi la Virée de Galerne et en revint vivant ; et Pierre Chabauty, valeureux capitaine de paroisse qui fut de toutes les guerres jusqu’en 1815. On aurait pu y ajouter le nom de Poirier de Beauvais, commandant de l’artillerie, qui eut un rôle décisif dans la retraite des Vendéens.
Protégés du vent par l’épais rideau d’arbres et réchauffés par les rayons du soleil qui illuminaient le mémorial, nous prenons notre temps avant de revenir à la Croix de Bel-Air. De là, nous partons à pied, aussi bien couverts que bottés, dans la direction opposée, vers le Pont-Paillat. La route descend en pente douce. À la Chaignelaie, nous marquons un arrêt pour nous souvenir du vieillard Souchelot, surpris ici dans son lit et brûlé vif par les Bleus, le 14 mars 1794. Nous poursuivons. La route se fait plus étroite.
Devant la Chaignelaie, lieu de mémoire des Colonnes infernales
Xavier Paquereau (Alliance Royale) marche d'un pas décidé.
Un vrai royaliste ne se laisse pas impressionner par un peu de boue !
On touche au but, le Pont-Paillat n'est qu'à quelques mètres
Un vestige de l'ancienne route de Bressuire à Mauléon
Jacques Chauvet, écrivain vendéen, et Richard Lueil, organisateur de la sortie
Nous voici bientôt sur un simple chemin de terre dont la pluie a rempli les profonds sillons creusés par les engins agricoles. On imagine la difficulté des combattants embourbés dans les fondrières de l’hiver 1793-1794, minés par le froid, la faim, et sous la menace constante de tireurs embusqués… Le Pont-Paillat et son dos-d’âne nous mettent enfin au sec. Richard évoque alors la fuite désordonnée des Vendéens battus au Bois des Chèvres, et qui n’avaient que ce passage pour regagner Mauléon. Il nous montre vers l’ouest la butte sur laquelle Poirier de Beauvais aurait pointé son artillerie pour couvrir la retraite. Une dernière photo de groupe avant de rebrousser chemin (et quel chemin !) cette fois dans le sens de la côte. La route semble plus longue. À l’approche de la croix de Bel-Air le vent se lève soudain, qui nous fouette d’un fin grésil. Heureusement, les voitures ne sont pas loin. Il est temps de partir vers Nueil.
La Noue Ronde, lieu de massacre des Colonnes infernales
Richard en tête de cortège nous y emmène en passant par la Noue Ronde, où Marie Genevière Échasseriau, née David, fut elle aussi massacrée par les Bleus le 14 mars 1794. Au bout de cette pérégrination sur les petites routes du Bocage, nous arrivons à Nueil, devant le cimetière. C’est ici que repose le capitaine de paroisse, Pierre Chabauty (parfois orthographié Chabeauty ou Chabouty). Richard nous brosse le portrait de ce jeune homme de 19 ans qui prit les armes en 1793 et ne les déposa qu’au retour du Roi, en 1815.
Jordan et Arnaud déposent des fleurs sur la tombe de Chabauty, jeune chef vendéen
Évocation historique devant la tombe de Chabauty
À quelques pas de là, l’église abrite d’intéressants souvenirs historiques : un tableau de la Crucifixion portant les marques des coups de feu tirés par les soldats républicains ; en face, le martyrologe de la paroisse, avec les noms des victimes des Colonnes infernales dont Richard nous avait parléà la Chaignelaie et à la Noue Ronde ; et un vieux calvaire de granit daté de 1675 brisé sous la Révolution. Autrefois dressé près de la ferme de Bellevue, il a été replacé dans le chœur de l’église. On peut voir également, sur un pilier près de l’entrée, une plaque rappelant le bris de la porte lors des inventaires de 1906.
Le tableau de la Crucifixion marqué d'impacts de balles républicaines
Dans le chœur, la statue de saint Eutrope, patron du diocèse
de La Rochelle-Maillezais (dont Nueil dépendit jusqu'à la Révolution)
et le vieux calvaire de 1675 frappé du cœur vendéen
Faute de temps, nous avons renoncé aux étapes prévues pour la suite ; réservons-les pour une prochaine sortie… En revanche nous nous sommes tous retrouvés à Cerizay, chez Richard et Nadine, qui nous ont gentiment offert le café et la brioche pour conclure cette sympathique journée de retrouvailles entre Brigands de la Vendée.
La Croix de Bel-Air, à la fin de notre promenade
À lire également, le compte rendu de Richard sur son blog Chemins Secrets
Carte des lieux visités (à l'exception de la Fontaine-Amère) :