En feuilletant le catalogue de l’exposition Charette, l’homme et sa légende, qui rassembla au Logis de la Chabotterie, en 1996, un grand nombre d’objets, tableaux et gravures du général vendéen, mon regard s’est arrêté sur deux portraits similaires, mais assez éloignés de l’image officielle. D’autant plus éloignés qu’on les attribue parfois à Stofflet, le rival de Charette !
Deux portraits de Charette, d'après le catalogue de l'exposition Charette, l'homme et sa légende (1996, p. 77)
Les deux portraits du catalogue de l’exposition de 1996 (illustration ci-dessus) sont référencés ainsi :
- N°225 – Charette. Manière noire par E. Gosselin ; h. 0 ,215 ; l. 0,155 ; fin XVIIIe siècle. Collection particulière.
- N°226 – Charette. Manière noire ; h. 0,138 ; l. 0,155 ; fin XVIIIe siècle. Collection Musée Dobrée, 56-2915.
Si la pose de trois-quarts change de l’un à l’autre, les portraits arborent les mêmes yeux en amande et sourire pincé. La tenue est identique : chapeau et plumet, mouchoir noué au cou, veste, pistolets glissés dans une ceinture blanche.
Le Musée de la Révolution françaiseà Vizille conserve le premier de ces portraits dans ses collections et l’identifie lui aussi à François-Athanase Charette de La Contrie sous le numéro d’inventaire 1988-33 (illustration ci-dessous).
Charette, d'après l'inventaire du Musée de la Révolution françaiseà Vizille
Mais il y a un hic ! Le second portrait de l’exposition (le N°266) se rencontre aussi à la BnF sous le nom de Stofflet, ce qui est d’autant plus intrigant que l’estampe est signée d’E. Gosselin, comme le premier (le N°225). Ce portrait (illustration ci-dessous) a été mis en ligne sur Gallica, avec la légende suivante : Stofflet. Chef vendéen néà Lunéville en 1751, fusilléà Angers en 1796. Rectifions la naissance : Stofflet est néà Bathelémont (à une quinzaine de kilomètres de Lunéville) en 1753.
Stofflet, par E. Gosselin (BnF)
Si nous connaissons le portrait réel de Charette grâce aux deux moulages réalisés peu après son exécution par Jean Cazanne, plâtrier figuriste de la rue Crébillon à Nantes, nous ignorons en revanche à quoi ressemblait Stofflet. Son crâne conservé au Musée d’Art et d’Histoire de Cholet pourrait peut-être nous révéler son visage si l’on y appliquait les méthodes de reconstitution en 3D éprouvées pour celui d’Henri IV en 2013 ou celui de Charette en 2015, bien qu’il manque le maxillaire inférieur.
L’incertitude demeure donc entre ces portraits de Charette ou Stofflet. Quelqu’un sait-il quand Gosselin les a réalisés ? Étaient-ils destinés à illustrer un livre sur l’un ou l’autre des généraux vendéens ?
Mise à jour du 14 février 2021 : Un lecteur (@EcritsHistoire sur Twitter) a trouvé un indice dans le Bulletin et mémoires de la Société archéologique d'Ille-et-Vilaine, t. XXV, 1896, p. III. Y sont mentionnés les « Portraits des chefs vendéens Charette de la Contrie et Stofflet, gravure à la manière noire, E. Gosselin, sculpsit ». S'il s'agit bien des mêmes que ci-dessus, on aurait donc le portrait de Charette au N°225 du catalogue de l'exposition de 1996, et celui de Stofflet au N°226 (ainsi qu'on le voit sur Gallica).